植田正治 写真家 - SHOJI UEDA
PHOTOGRAPHE JAPONAIS
Filigranes Editions/L'oiseau rare, 2000 |
Shoji Ueda est né en 1913 à Sakai Minato dans la préfecture
de Tottori. Cet endroit situé sur l’île de Honshu, face à la mer du Japon est
surtout connu pour ses dunes de sable qui attirent un nombre considérable de
touristes avides de dépaysement et d’espace dans un pays où les mégalopoles et
les infrastructures ultra modernes tendent à couper l’individu de ses liens
avec la terre. Les dunes de sable de Tottori offrent l’image d’un petit désert
tombant à pic dans la mer, vision presque surréaliste de deux milieux naturels
qui semblent à première vue incompatibles…
Shoji Ueda, amoureux de sa terre natale va mettre à profit
ce panorama idéal et unique pour en faire le cadre de son travail
photographique : « Il y orchestre des compositions surprenantes à la
fois graphiques, très poétiques et empreintes d’humour, mettant en scènes sa
famille ou les enfants des écoles environnantes. Le modèle, en soi, compte
moins que la silhouette et la construction de l’image. Ces dunes, qu’il utilise
comme studio à ciel ouvert, lui permettent de faire ressortir le sujet dans une
esthétique précise fondée sur le dépouillement. » (MEP)
Paroles de Shoji Ueda
« En regardant les photos venues d’Europe, j’avais
emmagasiné dans ma tête une foule d’images, ou plutôt des façons de prendre des
photos qui ne demandaient qu’à être réalisées. »
« Les dunes, c’est mon studio. On ne peut pas trouver
d’arrière-plan plus parfait, car l’horizon est étirable à l’infini. Je dirais
que la dune est un paysage presque naturellement photographique. C’est la
nature, mais réduite à un fond unique. »
« J’aime introduire dans des paysages naturels des
éléments artificiels. J’aime bien que l’on sente une légère intervention du
photographe. »
« En peinture, en poésie, c’est assez facile d’élaguer,
de réduire à l’essentiel. Mais en photographie, c’est difficile de simplifier.
Quand on prend des photos dans la rue, on est souvent obligé de prendre des
choses qu’on aimerait bien enlever. »
RETROSPECTIVE DE SHOJI UEDA A LA MAISON EUROPEENNE DE LA
PHOTOGRAPHIE (MEP) A PARIS EN 2008 SOUS LE TITRE « UNE LIGNE
SUBTILE »
- Premières
œuvres 1929-1940
Dans son laboratoire, Shoji Ueda
s’essaye tour à tour aux rayogrammes, solarisations, déformations. A la prise
de vue, il travaille les plongées, les contre-jours et se donne des principes
de composition pour le moins originaux. Cette curiosité pour les différentes
facettes de la pratique photographique, il la tient de la découverte des
travaux de créateurs européens. Celle-ci le libère du style pictorialiste qu’il
avait à ses débuts adoptés.
- De
la nature morte au paysage, années 50
Après avoir mis en scène des
personnages, Shoji Ueda dispose sur le sable des objets et ses images qui
ressemblent alors étrangement à des tableaux surréalistes. Mais c’est autour de
l’exploration approfondie du médium photographique, des ressources du noir et
blanc, que l’œuvre va continuer de se construire, en relation avec un choix de
thèmes appropriés. Les motifs sont empruntés à un environnement familier du
photographe et l’eau joue un rôle plastique prépondérant.
- Théâtre
de la dune, 1945 – 1951
Les œuvres les plus connues de
Shoji Ueda sont attachées à cette période. Ce sont tout d’abord les membres de
sa famille qui constituent le principal réservoir d’acteurs composant ces
scènes qui se jouent sur les dunes. Les premières images sont très pures,
dépouillées, comportent peu de personnages, puis les scènes deviennent plus
complexes ; d’autres acteurs pénètrent dans le décor de sable. Dans ce
paysage se développe également une série de nus.
- Enfants,
1955-1970
Tout au long de son œuvre, les
enfants ont peuplé et animé les images de Shoji Ueda. Il décide de les
photographier au fil des saisons, en hiver dans la neige ou en été à l’ombre
des arbres. Des enfants en fête, ou saisis alors qu’ils avancent sur le chemin
de l’école. Des enfants dont les silhouettes ponctuent l’horizon ou qui au
contraire occupent le devant de la scène. Le jeu et la complicité qu’il réussit
à établir avec eux sont toujours perceptibles.
- Paysages
modernes, 1970-1985
Très attentif à la nature, à ce
qui se passe dans le ciel comme sur la mer, aux mouvements de la végétation
ainsi qu’aux petits accidents que l’homme peut provoquer, Shoji Ueda capte des
formes subtiles, mais insuffle également de l’esprit à travers celles-ci. Il
n’a de cesse de développer sa sensibilité, d’enrichir d’images toujours plus
nuancées sa perception du monde. Shoji Ueda interrompt à quelques reprises son
travail pour voyager en Europe. Il ne cesse pour autant de photographier et ce
regard qu’il porte sur un monde qui nous est familier a quelque chose
d’intrigant. Cet intermède visuel, dont il tient à préciser qu’il constitue
« un souvenir silencieux », nous en dit plus sur l’art du photographe,
sur ce qui a pu mobiliser son attention, que sur le sujet même de la
photographie.
- Retour
à la dune, 1980-1990
A l’initiative de son fils
Mitsuru, Shoji Ueda revient sur les lieux de ses photographies les plus
célèbres. Il retrouve le sable et le ciel, la lumière des dunes et du bord de
mer. Mais l’espace de ses images va cette fois se construire autrement, son
champ de vision est plus large s’il expérimente d’autres formats
photographiques. Il met également en scène d’autres types de personnages. Et à
la fin de sa vie, son regard sera irrésistiblement entrainé vers la mer.
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Shoji Ueda a fait également partie d’une exposition collective
à la MEP (en 2017) consacrée à des photographes japonais lesquels étaient Ihei
Kimura (1901-1974), Yasuhiro Ishimoto (1921-2012), Shomei Tomatsu (1930-2012),
Hiromi Tsuchida (né en 1939), Ikko Narahara (né en 1931), Eikoh Hosoe (né en
1933), Hiroshi Sugimoto (né en 1948), Hiroshi Yamazaki (1946-2017), Nobuyoshi
Araki (né en 1940), Masahisa Fukase (1934-2012), Daido Moriyama (né en 1938),
Taiji Matsue (né en 1963), Seiiji Furuya (né en 1950), Miyako Ishiuchi (né en
1947), Toshi Shibata (né en 1949), Ryuji Miyamoto (né en 1947), Naoya
Hatakeyama (né en 1958), Hiro Wakabayashi (né en 1930) et Keiichi Tahara
(1951-2017).
Rappelons que la MEP détient un immense fonds photographique
japonais de plus de 1300 ouvrages publiés des années 50 à nos jours,
consultables à la Bibliothèque (se renseigner pour plus d’informations).
Et si le sable japonais vous colle toujours à la peau lire
le roman La femme des sables de Kôbô Abe ou s’immerger dans son
adaptation cinématographique (drame/Thriller de 2h27 réalisé en 1964 par
Hiroshi Teshigahara) mais il n’est pas sûr que vous vous en sortiez indemne…
MAISON EUROPEENNE DE LA PHOTOGRAPHIE
MEP, 5-7, rue de Fourcy (Paris IVe)
Tél. 01 44 78 75 00
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